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Cri d’alarme à Hong Kong
Economie

Cri d’alarme à Hong Kong

mardi, 2 juin 2015
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Christophe Roulet
Rédacteur en chef, HH Journal

“Vouloir est la clé du savoir.”

« Une trentaine d’années passées dans les travées du journalisme, voilà un puissant stimulant pour en découvrir toujours davantage. »

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Répercussion de l’envolée du franc, baisse du tourisme, ralentissement chinois… Hong Kong, première destination mondiale pour les horlogers suisses, est en chute libre. Par courrier spécial, la Fédération hongkongaise des distributeurs de montres réclame des baisses de prix aux producteurs suisses.

Cette fois-ci, la chute est brutale et le commentaire des plus explicites. Selon les statistiques des douanes helvétiques, en avril 2015, les exportations horlogères suisses vers Hong Kong ont enregistré une chute de 29,7 % en valeur à CHF 260,5 millions. Commentaire de la Fédération de l’industrie horlogère suisse, qui relaie ces données mensuelles affichant une quasi-stagnation à – 0,8 % pour l’ensemble de la branche : « Sur les principaux marchés, peu de baisses sont à relever, mais elles ont été marquées. À commencer par Hong Kong, où le recul des exportations semble s’aligner sur la réalité des ventes locales. » Jusqu’ici, en adoptant un prisme plus large, personne n’aurait encore osé peindre le diable sur la muraille. Certes, l’expédition de garde-temps helvétiques vers cette région administrative spéciale n’a pas connu de croissance l’an dernier, mais même en données cumulées le recul de 10 % observé sur le premier trimestre de l’année en cours n’apparaissait pas catastrophique.

Une baisse de 40 % des ventes

À la suite des chiffres d’avril, les optimistes doivent aujourd’hui déchanter. En intégrant ce recul de près de 30 %, les quatre premiers mois 2015 se soldent par une baisse de 15,6 % à CHF 1,1 milliard pour Hong Kong. Seule la Russie fait pire avec un effondrement des exportations helvétiques de 21 % vers cette destination sur la même période. En sachant que le pays de Vladimir Poutine pointe au 19e rang dans la liste des principaux débouchés pour les horlogers suisses, c’est dire si les dégâts sont autrement moins importants qu’à Hong Kong ! Hong Kong qui caracole en tête du même palmarès pour avoir accaparé 18,5 % du total des ventes de montres suisses à l’étranger, soit CHF 4,1 milliards enregistrés en 2014. C’est en 2008 déjà que Hong Kong a rattrapé les États-Unis comme premier marché d’exportations de la branche, pour représenter aujourd’hui pas loin de deux fois les ventes réalisées au pays de l’oncle Sam l’an dernier, soit CHF 2,3 milliards.

Fin avril, le cri d’alarme en provenance des revendeurs hongkongais ne laissait toutefois planer aucun doute sur l’état de la situation. Comme le rapporte le quotidien Le Temps, les Maisons horlogères suisses ont alors reçu un courrier de HK Watch, la fédération locale des distributeurs de montres, faisant état d’une « crise profonde ». Et la missive de parler d’une chute des ventes de 40 % au premier trimestre. Compte tenu de l’écart avec les statistiques des exportations suisses, écart qui commence à peine à se combler, cela revient à dire que les stocks s’empilent dans les boutiques de Hong Kong à un « niveau incalculablement élevé de 6 à 10 mois pour certaines marques », relève la HK Watch. Face à cette situation, où il devient « extrêmement difficile de maintenir nos recettes, sans parler de rentabilité », la fédération hongkongaise demande aux marques suisses de mettre de l’ordre dans leur politique de prix et d’accorder des rabais à ses membres.

Réduction généralisée des prix ?

Si les maux sont aujourd’hui perçus douloureusement, les causes n’en ont pas moins été clairement identifiées. À commencer par la lutte anti-corruption appliquée avec vigueur en Chine depuis plus de deux ans. En d’autres termes, les chefs-d’œuvre horlogers helvétiques, souvent achetés à Hong Kong pour échapper à la taxe chinoise sur les produits de luxe et volontiers offerts en échange de faveurs de tous ordres, n’ont plus la cote. Et c’est un euphémisme. De plus, le ralentissement économique qui frappe l’Empire du Milieu se reporte immanquablement sur l’inclination à la dépense. Or Hong Kong, avec 47 millions de visiteurs en provenance de Chine continentale, selon les chiffres 2014, vit largement de cette manne touristique. Il suffit de se promener dans les quartiers insulaires de Central et Causeway Bay ou encore à Tsim Sha Tsui sur la péninsule de Kowloon pour se rendre compte de la place qu’occupent les boutiques horlogères, prêtes à dérouler le tapis rouge devant leurs hôtes « étrangers ». Mais encore faut-il que Hong Kong garde tout son attrait. Ce qui est moins sûr. À la suite des nouvelles facilités dans l’obtention de visas, les voyageurs chinois se tournent aujourd’hui vers d’autres destinations, encouragés dans leurs emplettes horlogères par la faiblesse du yen ou de l’euro.

Quelle sera la réaction de l’horlogerie helvétique face à ce cri d’alarme ? À n’en pas douter, la réponse est pour l’instant loin d’être unanime. Nick Hayek, patron du groupe Swatch, a déjà fait savoir que toute baisse des prix serait « dommageable » pour l’ensemble de la branche : « L’industrie horlogère suisse a agi avec calme et sérénité ces dernières années, expliquait-il récemment. Or, aujourd’hui, certaines marques semblent totalement perdre leurs nerfs. » Patek Philippe et Panerai font-elles partie de celles-là pour avoir annoncé publiquement une réduction de leurs prix de 7 % pour la première et de 5 % pour la seconde. Chanel s’y est également résolu avec des baisses de 20 % accordées sur plusieurs de ses modèles emblématiques de sacs à main. Pour Desmond Marshall, de la société hongkongaise Rouge International, spécialisée dans le marché du luxe, relayé par Le Temps, « lorsque les grandes maisons s’y mettent, la pression devient générale. Toutes les marques horlogères, je dis bien toutes, se sont résolues à réviser leurs prix à la baisse ». Les années de folie à Hong Kong, question de souvenirs ?

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