La montre Fifty Fathoms est née en 1953 de la rencontre entre trois hommes. Jean-Jacques Fiechter, PDG de Blancpain en Suisse, comptait parmi les premiers amateurs de plongée sous-marine de loisir. Un jour qu’il plongeait à 50 mètres de profondeur, il risque l’accident fatal en perdant la notion du temps. Il prend alors conscience de l’importance d’un instrument de mesure adéquat et commence à travailler sur le sujet. En parallèle, le capitaine Robert « Bob » Maloubier et le lieutenant Claude Riffaud créent en France l’unité des Nageurs de combat. Après avoir recherché sans succès une montre qui pouvait répondre à leurs besoins, ils décident d’en déterminer eux-mêmes les caractéristiques et se mettent en quête d’un fabricant. Ils ne rencontrèrent toutefois guère d’enthousiasme – on estimait qu’un tel produit n’avait pas d’avenir – jusqu’à ce que Jean Vilarem, qui dirigeait Spirotechnique, leur fournisseur en équipement de plongée, les mette en contact avec Jean-Jacques Fiechter.

Les Français et le Suisse étaient faits pour s’entendre vu qu’ils étaient arrivés aux mêmes conclusions. Ensemble, ils décident donc de créer leur propre instrument de mesure que Bob Maloubier décrit comme « une montre avec un cadran noir, de grands chiffres et des indications claires sous la forme de triangles, cercles et carrés ainsi qu’une lunette extérieure tournante qui reprend les repères du cadran », cette dernière permettant de visualiser le temps de plongée restant. Il fut également décidé que cette montre serait plus grande que la normale à l’époque (41 mm de diamètre), dotée d’aiguilles et index luminescents pour une parfaite lisibilité dans l’obscurité, d’un mouvement automatique qui solliciterait moins l’usage de la couronne, d’une cage intérieure qui la protégerait des champs magnétiques et, naturellement, d’un boîtier étanche. La création bénéficia de trois brevets déposés par Jean-Jacques Fiechter : couronne doublement verrouillée, fond vissé par un système de joints toriques et lunette munie d’un mécanisme de blocage. Au final, il s’est révélé que cette montre de plongée de 1953 réunissait la quasi-totalité des caractéristiques de la norme NIHS 92-11 (ISO 6425) établie en 1996 pour les montres de plongée, quelque quarante ans plus tard !
Les Fifty Fathoms historiques
Cette création d’avant-garde a été baptisée Fifty Fathoms (50 brasses), mesure britannique correspondant à environ 91,5 mètres que l’on considérait alors comme la profondeur maximale atteignable par des plongeurs. Jean-Jacques Fiechter a d’emblée été séduit par le terme Fathom figurant dans le chant d’Ariel rédigé par Shakespeare dans La Tempête : « Full fathom five thy father lies, Of his bones are coral made » (« Par cinq brasses ton père gît, De ses os le corail est fait »). Créée pour les militaires français, la Fifty Fathoms a ensuite été adoptée par de nombreux corps d’armée à travers le monde. Mais en raison des législations locales, elle a dû prendre des noms différents. Ainsi, en France, elle a pris celui d’une marque de la société Spirotechnique, Aqua Lung, et aux États-Unis celui de Tornek-Rayville – Tornek, nom du distributeur américain, et Rayville, anagramme phonétique de Villeret, le village de Blancpain –, complété par la mention Milspec pour les spécifications militaires.

Parallèlement, la Fifty Fathoms a fait l’objet d’éditions destinées aux plongeurs civils. Elle a notamment connu un remarquable succès pour avoir été adoptée sous le nom d’Aqua Lung par le commandant Jacques-Yves Cousteau, immortalisée lors des plongées qui ont servi de matériaux au film Le Monde du silence, Palme d’or à Cannes en 1956 et récompensé d’un oscar à Hollywood un an plus tard.

Durant la trentaine d’années que Jean-Jacques Fiechter a passées à la tête de Blancpain, la Fifty Fathoms a connu de multiples variations et l’adjonction de quelques particularités. Très rapidement, on a vu des modèles dotés d’un indicateur d’humidité à pastille, passant du bleu au rose pour signaler la pénétration d’eau. Dans les années 1950, on a également distingué les modèles civils des modèles militaires. Les premiers, contrairement aux seconds, ne contenaient pas de matière radioactive et portaient de ce fait le pictogramme de la radioactivité barré sur le cadran. Plus tard, Jean-Jacques Fiechter hésita à ajouter un guichet dateur qu’il savait sans importance pour les plongeurs mais qu’il jugea finalement pratique hors de l’eau. Une telle question ne se pose plus depuis que les montres de plongée sont aussi des montres sportives que l’on porte en toutes circonstances.

Les Fifty Fathoms du XXIe siècle
La collection Fifty Fathoms a été renouvelée en 2007. Blancpain a alors présenté les trois modèles contemporains que sont l’automatique à quantième dotée de 5 jours de réserve de marche, le chronographe flyback utilisable en plongée et le tourbillon volant dont l’autonomie atteint 8 jours. Les boîtiers de 45 mm de diamètre sont étanches à 300 mètres – ils l’étaient déjà systématiquement depuis 2003 – et munis de protège-couronnes. En 2009, la 500 Fathoms équipée d’une valve de décompression à hélium a porté l’étanchéité à 1 000 mètres et, en 2011, la X Fathoms a intégré, en première mondiale, un profondimètre mécanique ultra-performant. Par ailleurs, la collection Fifty Fathoms s’est enrichie de modèles féminins à compter de 2008 et d’une pièce d’exception, le chronographe flyback à quantième complet et phases de lune, en 2010. Enfin, une ligne complémentaire déclinée au masculin et au féminin a vu le jour en 2013. Plus urbaine, la Fifty Fathoms Bathyscaphe reprend le nom et les caractéristiques d’un modèle de 1956 qui faisait référence au submersible conçu par le Suisse Auguste Piccard.
