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La Blockchain, une solution face à la contrefaçon...
Regards de connaisseurs

La Blockchain, une solution face à la contrefaçon horlogère ?

lundi, 7 octobre 2019
Par Hope Frost
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Hope Frost

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15 min de lecture

Sauriez-vous faire la différence entre une véritable montre Rolex et une contrefaçon ? Avec plus de 40 millions de fausses montres produites tous les ans aux designs toujours plus réalistes, les fraudes inondent le marché de l’horlogerie de luxe. Face à ce problème grandissant, la Blockchain, ou chaîne de blocs, peut-elle être une solution de lutte efficace ?

Si les contrefaçons existent déjà dans le monde de l’art et dans l’industrie de la mode, l’industrie horlogère n’y échappe pas non plus. Cela implique que les longues heures de travail, la propriété intellectuelle, la créativité et l’innovation des experts du monde horloger sont en train d’être volées. Les contrefacteurs et autres faussaires sont des professionnels et deviennent de plus en plus difficiles à repérer. Aujourd’hui, les principaux acheteurs de contrefaçons sont issus de la génération Z, et on estime qu’environ 74 % des jeunes Américains et 84 % des Chinois en achètent. Cependant, la technologie Blockchain pourrait aider à éliminer ces imposteurs.

Les problèmes posés par le marché des contrefaçons

L’imitation est souvent considérée comme la rançon de la gloire ; quand une Maison horlogère produit une montre vouée à rencontrer un certain succès, de fausses versions de cette même montre apparaissent toujours peu de temps après. Le marché de la contrefaçon est en plein essor, et on retrouve aujourd’hui des contrefaçons de plus en plus réalistes allant parfois jusqu’à reproduire à l’identique le mouvement mécanique de la montre. Le succès que rencontrent ces montres peut s’expliquer entre autres du fait que les montres de luxe sont souvent perçues comme un symbole de réussite sociale, et même si beaucoup ne peuvent se permettre d’en acheter une version originale ils souhaitent néanmoins s’associer à l’image de luxe de la marque en question et bénéficier du côté ostentatoire qu’elle renvoie.

Dans ce cas précis, les personnes qui achètent ces fausses montres sont au courant qu’elles paient pour avoir une pâle copie n’ayant pas nécessité le même nombre d’heures de travail et de décennies d’expertises indispensables à la production de la version originale. Cependant, les acheteurs de contrefaçons ne sont pas tout le temps au courant de l’authenticité de leurs achats. Il arrive régulièrement, surtout sur le marché des montres d’occasion, que de fausses montres parviennent à tromper certains acheteurs. Dans les deux cas, les problèmes que posent ces montres restent les mêmes.

Le premier problème posé par les fausses montres, c’est qu’elles imitent illégalement le nom et le logo d’une marque. Deuxièmement, ce sont de mauvais investissements, car elles sont généralement composées de matériaux de mauvaise qualité, peu souvent étanches et dans certains cas très imprécises. En d’autres termes, contrairement aux montres certifiées qui constituent un véritable investissement sur le long terme et malgré un prix initial souvent attrayant, les fausses montres ne prennent jamais de valeur et ne couvrent pas leur prix à la revente. La sûreté et l’origine de ces montres ne peuvent pas être garanties non plus. Elles sont fabriquées au sein de manufactures horlogères non réglementées pouvant utiliser des matériaux non responsables. Elles constituent donc un danger pour l’environnement voire pour leurs porteurs tout en étant une source de financement lucrative pour l’économie parallèle. En conséquence, il est clair que les fausses montres ne peuvent procurer la même admiration et le même sentiment de joie qu’offrent les montres authentiques.

La technologie Blockchain permet de créer des certificats digitalisés et infalsifiables qui prouvent l’authenticité d’une montre.
La Blockchain, une nouvelle ère dans la transparence

La Blockchain est une technologie de stockage d’informations décentralisée et entièrement transparente. En d’autres termes, c’est une base de données permettant la collecte d’informations de manière totalement autonome et qui ne peut être altérée, à la différence de certificats d’authenticité en papier. C’est une plateforme qui met simplement en relation des entités homologues sans l’intervention d’une autorité ou d’intermédiaires tiers. C’est donc une base de données facilement accessible et consultable par ses utilisateurs mais qui ne peut être modifiée.

Comment pleinement exploiter le potentiel de la Blockchain ?

La Blockchain a beaucoup de domaines d’application, mais il se trouve qu’elle est aussi un formidable outil pour aider à stopper la production de contrefaçons d’objets de luxe comme les montres. Sa technologie permet de créer des certificats digitalisés et infalsifiables qui prouvent l’authenticité d’une montre. Chaque montre est dotée d’un certificat qui lui est propre et qui est déposé sur la base de données. Celui-ci permet d’assurer une parfaite traçabilité et d’identifier l’origine et l’historique de propriété de chacune d’elles tout en les différenciant des contrefaçons qui ne disposent quant à elles d’aucune trace sur le système. Cela veut dire que si la maison horlogère et le revendeur d’une montre prennent part à la Blockchain, celle-ci peut être retracée jusqu’à son origine en toute transparence.

La Blockchain rend aussi obsolètes tous les certificats d’authenticité papier. Par conséquent, elle peut être utilisée pour prouver la propriété légale d’une montre et vérifier si son revendeur potentiel en est le véritable propriétaire. Ce système complet de traçabilité rend aussi les contrefaçons moins séduisantes, car elles sont désormais plus facilement repérables. Par exemple, on pourrait imaginer une application mobile connectée à une base de données Blockchain qui prouverait en un rien de temps l’authenticité d’une montre portée au poignet ou au contraire démasquerait tout aussi facilement une montre frauduleuse.

Les maisons horlogères se verraient poussées à se soucier de l’origine de chacun des matériaux utilisés pour la confection des montres.

Au-delà de son efficacité avérée pour lutter contre les fraudes, la Blockchain peut aussi être utile à l’industrie horlogère d’une autre manière. En février 2018, la Maison Chopard a promis qu’elle n’utiliserait que de l’or produit de manière durable et a déclaré par la même occasion que la Blockchain était un outil potentiel qui l’aiderait à retracer l’origine de l’or en question. Cela obligerait Chopard à conserver l’origine exacte de chacune de ses pièces en or et offrirait à ses clients la possibilité de retracer l’origine de l’or contenu dans leurs pièces et de s’assurer qu’il provienne bien d’une source éthique. Cela pourrait avoir des répercussions énormes sur le futur de l’industrie horlogère, car l’origine de l’ensemble des différents composants d’une montre pourrait être retracée. Les maisons horlogères se verraient poussées à se soucier de l’origine de chacun des matériaux utilisés pour la confection des montres.

Les précurseurs de la Blockchain

La Maison Vacheron Constantin a été l’une des premières dans l’industrie des montres de luxe à faire le pas lors du lancement de leur collection Les Collectionneurs cette année. La Blockchain permet ici à chacune des montres de la collection d’avoir un certificat d’authenticité numérique qui lui est propre et qui retrace son origine. Toutes les informations disponibles sur chaque montre seront entièrement transparentes et accessibles aux clients.

Une autre organisation pionnière dans l’utilisation de cette technologie est Chronobase. Cette dernière offre la possibilité aux propriétaires de montres de luxe d’enregistrer leurs pièces dans une base de données qui se sert de la technologie Blockchain. Cette base de données est accessible sous forme d’application et permet, si les différentes parties concernées par la montre s’impliquent dans le processus, de confirmer l’authenticité de chaque pièce enregistrée et de retracer son origine. L’application peut même servir à alerter les autorités d’un vol et faciliter la prise de contact avec un propriétaire de montre volée si une tentative de revente de cette montre a été repérée.

D’autres projets issus d’industries diverses et variées s’appuient sur la technologie Blockchain pour satisfaire des besoins clients. C’est le cas du projet LUKSO, qui se sert de la Blockchain pour apporter des réponses à l’industrie de la mode. Le projet consiste à créer une Blockchain publique et indépendante qui a pour but de fournir une « plateforme de confiance » auprès des marques, des start-up et des clients issus de la mode. LUKSO favorise la transparence et offre une Blockchain qui permet d’enregistrer l’origine de l’ensemble des composants de chaque produit, créant ainsi de la valeur ajoutée notamment pour les pièces de luxe.

LUKSO estime que cette technologie est en passe de devenir essentielle afin de répondre aux nouvelles demandes de la génération Z, qui cherche constamment à en savoir plus sur ce qu’elle achète, et l’origine et le lieu de production des matériaux utilisés en font partie. À une époque où il est plus que jamais question de toucher aux notions de « mode éthique » et de « développement durable », la Blockchain pourrait se traduire comme un véritable élément de réponse à ces problématiques.

VeChain offre aussi des services qui se basent sur la Blockchain. Parmi ceux-ci, VeChain propose plusieurs outils qui luttent contre les contrefaçons en améliorant la traçabilité des produits enregistrés sur leur base de données et en fait une option intéressante pour l’industrie des montres de luxe.

La Blockchain peut aussi influencer autrement l’industrie horlogère. En 2018, Hublot et OS Limited, courtier spécialisé dans les actifs numériques et leader en Asie, s’associent pour créer la montre Big Bang Meca-10 P2P. Afin de célébrer le 10e anniversaire du bitcoin et pour rappeler qu’il n’en existera jamais plus de 21 millions dans le monde, la montre se limite à 210 exemplaires et ne peut s’acheter qu’en bitcoins. Le design de la montre s’inspire de l’esthétique générale du bitcoin et de la Blockchain grâce à des éléments de design aux allures industrielles et avec un bracelet estampé du logo de la Blockchain. Cependant, vendue au prix de 25’000 $ alors qu’elle n’offre aucune caractéristique bien spéciale, la montre ne fait pas l’unanimité auprès des amateurs de montres, qui la considèrent plus comme une tentative d’alignement de la marque avec la technologie Blockchain qu’une véritable preuve de savoir-faire de la Maison.

Le secteur de l’industrie horlogère sur lequel la technologie pourrait avoir le plus gros impact est le marché des montres d’occasion. La technologie permettrait aux vendeurs et aux potentiels acheteurs d’avoir un gage d’authenticité des montres mises en vente. Un tel outil pourrait donc faire fortement progresser le nombre de potentiels acheteurs, car il ferait disparaître tout risque d’asymétrie d’informations. Enfin, cela réduirait aussi le nombre de fausses montres en circulation sur le marché et renforcerait donc l’image de marque des maisons horlogères concernées.

Certaines marques pourraient être réticentes à l’idée de se servir de la Blockchain, car elles se doivent d’être à l’aise avec la totalité de leur chaîne de production.
Les problèmes de la Blockchain

La chaîne de blocs reste une technologie nouvelle et, comme n’importe quelle technologie innovante de ce type, des changements structurels et de nouvelles manières de penser doivent être implémentés avant qu’elle ne puisse vraiment faire son effet. Pour que cette dernière devienne efficace, elle doit en amont réunir un nombre colossal d’informations, et toutes les parties impliquées dans la chaîne de production des montres doivent aider à cette collecte d’informations. Plus la somme d’informations collectées est grande et plus la technologie devient efficace et assure l’authenticité d’une montre.

Ce qu’il y a de plus révolutionnaire avec la Blockchain, c’est l’extrême transparence qu’elle crée, et c’est en cela que certaines marques pourraient être réticentes à l’idée de s’en servir, car elles se doivent de maîtriser parfaitement la totalité de leur chaîne de production et d’être à l’aise avec. Néanmoins, c’est une avancée nécessaire pour que les clients puissent avoir pleinement confiance en elles. Cette totale transparence peut se révéler disruptive, mais les avantages qu’elle fournirait à toutes les parties sur le marché comparés à l’effort de collaboration auquel ces parties doivent consentir en valent le coup.

Un autre problème de taille avec cette technologie subsiste. Malgré le fait que les certificats numériques d’authenticité des montres ne peuvent pas être falsifiés, il n’existe toujours pas un moyen de distinction totalement sûr afin de faire correspondre la montre aux données inscrites dans la Blockchain. Un numéro de série pourrait être gravé sur les montres, or celui-ci pourrait facilement être copié.

SmartDust détient peut-être une partie de la réponse. Dotée d’une autre technologie innovante mais qui en est toujours à un stade embryonnaire, SmartDust est un outil de communication qui pourrait permettre au travers de détecteurs de lumière et de son d’identifier des objets via des caractéristiques électromagnétiques uniques qui leur sont propres. Ces caractéristiques pourraient ainsi donner lieu à des « empreintes digitales dust » pouvant être scannées afin de prouver leur authenticité et leur identité via les données de la Blockchain. Ces détecteurs ne mesurant que quelques millimètres n’altéreraient en rien le design des montres et pourraient se révéler une solution d’avenir.

Les avantages procurés par la technologie Blockchain sont nombreux, mais il est encore trop tôt et elle n’est pas suffisamment connue du grand public pour que les grandes marques puissent s’y atteler pleinement. Éduquer les différents agents du marché et effectuer des tests à plus grande échelle constituent des étapes indispensables avant que cette technologie ne puisse vraiment prendre place. Le premier pas à prendre dans la lutte contre le marché des contrefaçons est de faciliter la communication entre les marques, les consommateurs et les autorités afin de sensibiliser aux dangers du marché des fausses montres. La Blockchain pourrait ici agir comme un outil de prévention. Elle a le potentiel de pouvoir provoquer des changements inhérents au sein de l’industrie horlogère, de combattre les fraudes et d’exiger une transparence totale de la part des marques. Un changement d’une telle envergure prendra inévitablement du temps avant de pleinement s’imposer, mais il s’accompagnera à coup sûr de nouvelles opportunités et d’une meilleure sécurité pour les consommateurs.

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