Si la quasi-totalité des maisons horlogères suisses se précipitent aujourd’hui vers la Chine, si elles ne l’ont pas déjà fait depuis plusieurs années, c’est pour une raison bien simple : le pays, en plein boom économique, connaît également une croissance phénoménale des ventes de montres, notamment mécaniques, cette spécialité toute helvétique. Après la hausse de 43,1 % enregistrée en 2008, lui ayant permis de gagner deux rangs, pour atteindre la septième place des marchés d’exportations horlogères suisses, et après avoir limité les dégâts lors de la crise de 2009 (– 15,2% contre – 22,3% sur l’ensemble des marchés), voici le Céleste Empire reparti de plus belle.
Une croissance de 63 % sur huit mois
Entre janvier et août 2010, les exportations horlogères vers la Chine ont totalisé CHF 650 millions (USD 650 mio), en hausse de 63 %, soit la plus forte croissance enregistrée au sein des principales destinations de la branche. Ce résultat positionne désormais le pays en quatrième position des débouchés de l’industrie horlogère suisse, derrière Hong Kong (CHF 1,88 milliard / USD 1,88 mia), les États-Unis (CHF 998 millions / USD 998 mio) et la France (CHF 698 millions / USD 698 mio).
En sachant qu’une grande partie des exportations vers la région administrative spéciale qu’est Hong Kong sont ensuite réacheminées vers la Chine, pour des questions de droits de douane, c’est dire l’importance que revêt le pays pour les maisons horlogères helvétiques. À elle seule, la « Grande Chine », Hong Kong et Taïwan compris, a ainsi représenté 25 % du total des exportations horlogères suisses en 2009. Une année durant laquelle les deux premiers groupes horlogers que sont Swatch et Richemont ont réalisé respectivement 29 % et 26 % de leurs ventes sur le seul marché chinois. Pour mémoire, en 2001, la Chine ne figurait pas dans le classement des 15 premières destinations horlogères suisses. Elle n’apparaît dans ce palmarès qu’en 2003, à la 11e place.
Un commerce des plus dynamiques
C’est que la tradition horlogère est fortement ancrée dans l’empire du Milieu. Une tradition qui remonte en fait au xvie siècle, en 1582 plus précisément, lorsque des ambassadeurs représentant le Portugal firent don de la première horloge à sonnerie au gouverneur de la province de Canton dans le but d’apaiser un différend diplomatique. Depuis cette date, l’horlogerie mécanique a conquis le cœur des Chinois, véritable passion de la cour impériale. Mais si, dans un premier temps, ces garde-temps introduits en Chine provenaient de pays comme l’Angleterre, la France ou l’Allemagne, les principaux centres horlogers de l’époque, la Suisse s’est à son tour progressivement forgé une réputation dans l’art de la mesure du temps. Un art auquel les Chinois se sont montrés des plus sensibles, au xixe siècle notamment, lorsque les montres dites « chinoises » en provenance de Suisse, soit des montres de poche robustes, précises et résistantes aux climats humides, sont devenues l’objet d’un commerce extrêmement dynamique entre nos deux pays.
Le commerce est d’ailleurs un lien qui unit toujours fortement la Suisse et la Chine, comme on a pu s’en rendre compte lors de la visite à Beijing il y a quelques semaines de la présidente de la Confédération Doris Leuthard. Visite durant laquelle elle a pu s’entretenir avec le président, Hu Jintao. Au terme de cette rencontre, la Suisse et la Chine se sont en effet engagées à lancer des négociations en vue d’un accord de libre-échange. Aucun pays européen ne dispose à ce jour d’un tel accord. L’étude conjointe menée par les deux délégations a en outre largement souligné la complémentarité des deux économies et conclu qu’une ouverture des deux marchés, complétée par une réduction des entraves au commerce, améliorerait de manière significative la coopération économique entre la Chine et la Suisse, datant d’une soixantaine d’années. Assurément un bon point pour l’industrie horlogère helvétique.