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« La drôle de montre de Monsieur Roskopf » au MIH
Expositions

« La drôle de montre de Monsieur Roskopf » au MIH

vendredi, 28 juin 2013
Par Janine Vuilleumier
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Janine Vuilleumier

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7 min de lecture

A l’occasion du bicentenaire de la naissance de Georges-Frédéric Roskopf, une exposition retrace sa vie et présente «la Prolétaire», montre dénommée ainsi par son concepteur.

Née de l’idée de Jean-Michel Piguet, conservateur-adjoint au Musée international d’horlogerie (MIH), cette exposition retrace l’histoire de Georges-Frédéric Roskopf qui créa à La Chaux-de-Fonds une montre qu’il appela lui-même «la Prolétaire» et que l’on nomme souvent aujourd’hui «la montre Roskopf», d’après le patronyme de son concepteur. A première vue, cette montre bon marché, d’allure simple et robuste, n’a rien d’exceptionnel. Quelle est son importance et quelle trace laisse-t-elle alors dans l’histoire de l’horlogerie? Remontons deux siècles auparavant…

 

Georges-Frédéric Roskopf (1813-1889) © MIH

Georg-Friedrich Roskopf est né en 1813 à Niederweiler, situé dans le Grand-Duché de Bade en Allemagne. A l’âge de seize ans, il s’installe à La Chaux-de-Fonds. Il y apprend le français et entreprend un apprentissage de commerce. Il le poursuivra par une formation d’horloger. En 1835, Roskopf se marie avec une veuve fortunée. Un fils naîtra de cette union la même année, Fritz-Edouard. Roskopf s’installe alors comme fabricant d’horlogerie et produit des montres en or. En ce temps-là, La Chaux-de-Fonds est un lieu important pour l’horlogerie où la production de montres se divise en deux catégories: technique ou décorative. La création de l’Observatoire de Neuchâtel en 1858, puis de l’Ecole d’horlogerie en 1865 stimule les progrès techniques. La précision et le fonctionnement des montres s’améliorent et elles deviennent de plus en plus compliquées. En même temps, La Chaux-de-Fonds est le centre principal de la production suisse de boîtiers en or. Les artisans, formés d’abord dans les ateliers des maîtres et, dès 1870, à l’Ecole d’art, les décorent richement et en font de véritables chefs-d’œuvres. Ces montres de luxe, représentatives de la production chaux-de-fonnière de la deuxième moitié du 19e siècle, séduisent une clientèle aisée et internationale.

En 1867, alors qu’il y travaille depuis une dizaine d’année, Roskopf lance une montre qu’il prénomme «La Prolétaire». Simplifiée, elle indique uniquement l’heure et les minutes. L’utilisation de métaux non précieux et le choix de ne pas la faire décorer diminuent les coûts de production. Mise sur le marché au prix de vingt francs, elle est dix, voire trente fois moins chère qu’un garde-temps haut de gamme vendu à la même époque. Malgré son prix avantageux et sa bonne qualité, elle reste hors de portée de la plupart des ouvriers. Elle remportera tout de même une médaille de bronze lors de l’Exposition universelle de Paris en 1867.

Les premières Prolétaires sont fabriquées par Georges-Frédéric Roskopf selon le système de l’établissage. C’est au comptoir, généralement situé dans la demeure de l’établisseur, que s’effectue la terminaison, le montage final, puis la commercialisation des produits achevés. Avant cela, les mouvements transitent dans divers lieux, de la fabrique d’ébauches aux ateliers familiaux disséminés soit en ville de La Chaux-de-Fonds, soit dans les campagnes environnantes. Composé de 57 pièces, le mouvement de la Prolétaire se caractérise principalement par la suppression d’une roue dans le rouage, par l’utilisation de l’échappement à chevilles et par l’absence de minuterie, la mise à l’heure s’effectuant directement sur l’aiguille des minutes. Le nombre de montres «Prolétaire» fabriquées entre 1867 et 1873 peut être estimé à 60’000-70’000 exemplaires.

En 1874, suite au décès de son épouse, Roskopf remet son entreprise à deux sociétés chaux-de-fonnières, Wille Frères et Charles-Léon Schmid, qui poursuivent la fabrication de la montre du Prolétaire sous l’appellation Roskopf Patent. Un contrat spécifie les attributions de chacune des sociétés, qui s’engagent à produire les mêmes montres, les vendre à un prix identique et à utiliser une marque de fabrique commune. Un aspect financier est évoqué: les acquéreurs de cette marque paieront au citoyen Roskopf une indemnité de 50 centimes par pièce sur toutes les montres Roskopf qu’ils fabriqueront pendant quatre ans, reconnaissant ainsi les sacrifices faits par le fondateur pour donner à cette marque la valeur dont elle jouit.

Dans les années 1880, ces deux sociétés connaissent un développement important, marqué par la construction, en 1891, de deux usines: Wille Frères, située à la rue du Temple Allemand, et Charles-Léon Schmid, à la rue Alexis-Marie Piaget. Cette dernière deviendra une des plus importantes manufactures de La Chaux-de-Fonds, employant quelques 320 personnes en 1910. La production de la montre Roskopf Patent est ainsi concentrée en un seul lieu.

Parallèlement au déploiement de l’appareil de production, les deux entreprises unissent leurs efforts dans le domaine commercial avec la création d’une société commune. La production industrielle de la montre Roskopf permettra d’en diminuer le prix de production et d’en favoriser l’acquisition par un public plus large. On peut estimer à cinquante millions le nombre de montres Roskopf Patent produites par les deux firmes entre 1874 et 1947.

Le manque d’écrits concernant la vie de Georges-Frédéric Roskopf ne nous dit pas pourquoi il ne céda pas son entreprise à son fils plutôt qu’aux deux sociétés précitées. Fritz-Edouard Roskopf, négociant à Genève, s’est toutefois aussi lancé dans la production de montres éponymes environ dix ans après la mort de son père. Il dépose diverses marques de fabrique et brevets tout en s’associant avec des entreprises telles que la Société d’horlogerie de Rosières, A. Schild SA, fabrique d’ébauches de Granges et Cortébert Watch Co. Louis Roskopf, petit-fils de Georges-Frédéric, fonde également une société horlogère pour produire des montres Roskopf. Il s’unit dès le début avec une manufacture, la Société horlogère de Reconvilier.

Malgré le succès relatif de la Prolétaire en Suisse – et à La Chaux-de-Fonds en particulier – la vente des montres connaît un essor important sur les marchés internationaux. Les différentes médailles obtenues lors des expositions internationales y contribuent certainement, ainsi que les brevets déposés en Belgique, en France et surtout aux Etats-Unis. Ce garde-temps bon marché se diversifiera également au travers des motifs frappés sur ses boîtes avec des sujets commémorant des personnages illustres, des événements ou simplement les belles heures de l’histoire.

L’exposition «La drôle de montre de Monsieur Roskopf» est ouverte au public jusqu’au 19 janvier 2014 au MIH.

Exposition « La drôle de montre de Monsieur Roskopf » au MIH © MIH
Catalogue de l’exposition

Ecrit sous la direction de Jean-Michel Piguet, le catalogue de l’exposition retrace la vie de Georges-Frédéric Roskopf, l’inventeur de la montre bon marché destinée aux ouvriers et les péripéties liées à sa production. Il décrit également les aspects techniques du mouvement, la fabrication des successeurs et des différentes entreprises qui produisirent des «Roskopf», ainsi que l’évolution de la production en Suisse au 20e siècle. Richement illustré, cet ouvrage de 104 pages mêle documents d’archives, images d’objets relatifs à la montre Roskopf et trésors de collectionneurs passionnés. Il est disponible chez Watchprint (www.watchprint.ch) au prix de CHF 33.- / EUR 27.-.

Article paru dans la Revue FH

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