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L’horlogerie suisse construit à tout va
Economie

L’horlogerie suisse construit à tout va

mardi, 18 mars 2008
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Christophe Roulet
Rédacteur en chef, HH Journal

“Vouloir est la clé du savoir.”

« Une trentaine d’années passées dans les travées du journalisme, voilà un puissant stimulant pour en découvrir toujours davantage. »

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Avec 16% de croissance à l’exportation l’an dernier à près de CHF 16 milliards et encore 23% en janvier 2008, l’horlogerie suisse nage en pleine effervescence, faut-il encore le rappeler. Une effervescence qui se meut en véritable ébullition si l’on considère la Haute Horlogerie, en progression de 25,3% sur les douze mois 2007 en termes de valeurs à CHF 7,83 milliards (+16,7% en unités) et de près de 40% sur le premier mois de l’année (+45% en unités !), selon les statistiques de la Fédération de l’industrie horlogère suisse.

Avec un tel rythme, en nette accélération ces deux dernières années, il est tout simplement impossible de pouvoir envisager un schéma de production selon des critères encore valables il y a une dizaine d’années. Et pour une raison évidente : l’ensemble de la chaîne de création de valeur craque de partout avec, comme maux principaux, de graves goulets d’étranglement dans la production, synonymes de délais de livraison à rallonge, un assèchement de la main-d’œuvre et de gros problèmes de qualité des composants. « Il faut une normalisation de la situation qui passe par une réduction des délais », exposait récemment Luigi Macaluso, patron du groupe Sowind (Girard-Perregaux et Jean Richard).

Source: Bulgari
Source: Bulgari
La sous-traitance en émoi

Pour des groupes horlogers qui ont vécu un exercice 2007 en état de grâce, comme l’attestent les résultats de Swatch (chiffre d’affaires 2007 : +17,6%), de LVMH (croissance organique des ventes 2007, pôle Montres & Joaillerie : +19%), de PPR (performance 2007 du pôle luxe : +29%) ou encore de Richemont (ventes du troisième trimestre : +14% à taux de change constants), cette « envolée sauvage » n’est donc pas sans poser toute une série de questions, essentiellement industrielles. Et pour cause. Durant les années 90, ces multinationales du luxe ont en effet rempli leur portefeuille de marques prestigieuses, générant une vague de fusions et acquisitions sans précédent dans la branche. Mais comme le disent les spécialistes du secteur, si la marque est une porte d’entrée privilégiée vers le consommateur, encore faut-il que les produits soient à la hauteur et répondent à ses vœux.

Source: Richemont
Source: Richemont

Raison pour laquelle les Maisons horlogères ont alors commencé à lorgner du côté de leurs fournisseurs afin de parfaire leurs outils industriels dans un vaste mouvement d’intégration verticale. Ces rachats de PME n’ont certes pas fait la une des journaux comme à l’époque la reprise de Jaeger-LeCoultre, Breguet ou Zenith. Ils n’en ont pas moins modifié le paysage horloger, subrepticement, par petites touches certes mais non moins profondément. Dès le début des années 2000, nombre de sous-traitants actifs dans les cadrans, les aiguilles, les boîtes et les composants des mouvements horlogers ont ainsi changé de main, venant grossir les rangs des entreprises déjà bien établies mais également ceux des Maisons en quête de capacités industrielles dignes de ce nom, celles qui tendent vers le saint Graal que représente le mouvement de manufacture. Cette tendance au rachat de petites et moyennes entreprises hautement spécialisées du secteur n’est assurément pas arrivé à son terme, comme en témoignent les acquisitions faites ces quelques six derniers mois d’Elinor, fabricant de boites en métaux précieux, par F.-P. Journe, de Donzé-Baume, spécialiste de boîtes et bracelets, par Richemont, d’Indexor, producteur d’indexes pour cadran, par Swatch via MOM le Prélet ou encore l’alliance signée par Bulgari avec Leschot, également actif dans les boîtes de montre. Il n’en reste pas moins que depuis quelques temps déjà, les horlogers ont bien compris que l’intégration verticale à elle seule ne suffirait plus…

Source: Swatch Group
Source: Swatch Group
Une génération spontanée de nouveaux ateliers

Après la recherche de compétences pointues, place donc à celle de nouvelles capacités de production qui, chez certains horlogers, font à ce point défaut que cela se manifeste par des délais d’attente pouvant culminer jusqu’à trois ans sur certains nouveaux produits. Là également, le palliatif le plus confortable consiste à se remettre en chasse et viser quelque cible mal en point, voire une alliance avec les producteurs de l’ombre, ces horlogers qui travaillent à la réalisation de mouvements haut de gamme pour des tiers, comme l’a fait récemment Hermès en reprenant 25% de Vaucher Manufacture à Fleurier. Richemont n’a pas recherché autre chose en rachetant Minerva tout comme les capacités industrielles de Roger Dubuis. Quant à Bovet, en ressuscitant Dimier, la Maison a simplement donné un nouveau nom prestigieux à STT Holding, une structure dernièrement acquise comprenant trois sociétés de production spécialisées dans les tourbillons, spiraux et calibres.

Mais là encore, ces redistributions de carte n’ajoutent guère de nouvelles capacités à un secteur qui, globalement, doit étoffer son outil industriel. Qu’à cela ne tienne, les manufactures ont compris le message et sont en train d’orchestrer leur grand œuvre architectural, synonyme de surfaces de production additionnelles. Un phénomène qui s’est d’ailleurs également répandu dans le monde de la sous-traitance. « Les investissements immobiliers réalisés par les sociétés actives dans l’horlogerie se sont multipliés en cette période de haute conjoncture, commentait dernièrement Nicola Tibaudeau, directrice générale MPS Micro Precision Systems SA. Dans le vallon de Saint-Imier, dans les Franches Montagnes comme ailleurs, chaque village a vu ces toutes dernières années une ou plusieurs entreprises construire un bâtiment pour abriter les nouveaux ateliers, les nouvelles machines. Qu’adviendra-t-il de ces investissements quand le cycle se retournera ? » Pour l’instant, la question ne semble guère d’actualité, foi d’horloger !

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