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Points de vue

« Mon grand-père avait parfaitement préparé sa succession »

mardi, 21 décembre 2010
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Christophe Roulet
Rédacteur en chef, HH Journal

“Vouloir est la clé du savoir.”

« Une trentaine d’années passées dans les travées du journalisme, voilà un puissant stimulant pour en découvrir toujours davantage. »

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10 min de lecture

Marc Hayek, petit-fils de Nicolas G. Hayek, le fondateur du Groupe Swatch, a repris en direct, outre la marque Blancpain, qu’il dirigeait déjà, Breguet et Jaquet Droz. Entretien.

Il dirigeait déjà Blancpain. À la mort de son grand-père Nicolas G. Hayek, volontiers nommé le « sauveur de l’horlogerie suisse », Marc Hayek s’est également vu confier les maisons Breguet et Jaquet Droz. Il nous livre ici son analyse sur ces trois marques figurant dans la gamme « Prestige et Luxe » de la compagnie.

Comment conciliez-vous vos nouvelles fonctions à la tête de trois marques ?

Marc Hayek : Je dois bien avouer que je cours un peu plus. Mais entre Breguet et Blancpain, les parallèles sont assez nombreux, notamment du côté de la distribution. De plus, j’étais déjà dans le comité de pilotage de Breguet, si bien que je n’ai pas tout découvert lorsque j’ai repris ces nouvelles fonctions. D’une manière générale, je dirais que je passe 50 % de mon temps chez Breguet et 50 % entre Jaquet Droz et Blancpain. Pour ce qui est de Blancpain, les équipes sont stables et rodées. Cela fait maintenant une dizaine d’années que je travaille avec le même encadrement, au sein duquel nous sommes très complémentaires. Idem avec les équipes des deux autres marques, qui sont aujourd’hui composées de personnes aguerries, tout à fait à même de m’épauler. Alors, si je ne peux plus participer à tous les événements, je dispose des bonnes personnes pour représenter les trois marques. Je tiens toutefois à rester très présent pour ce qui est du développement produits.

Le décès de Nicolas G. Hayek a-t-il entraîné d’importants changements au sein du groupe ?

La disparition de mon grand-père a bien évidement profondément modifié nos vies au sein de la famille. Mais le fonctionnement du groupe n’a que très peu changé. Son décès nous a tous pris par surprise, mais en même temps nous avons réalisé qu’il avait parfaitement préparé sa succession au niveau des personnes mises en place et des structures organisationnelles. Nous allons donc poursuivre son travail en respectant son esprit et les valeurs qui lui étaient chères. Ce qui ne va pas nous empêcher d’évoluer, bien au contraire. La créativité dont il a fait preuve, c’est aujourd’hui à nous de la cultiver.

Récemment, les manufactures Frédéric Piguet et Nouvelle Lemania ont été directement rattachées à Blancpain pour la première et à Breguet pour la seconde. S’agit-il d’un changement d’importance au sein du Groupe Swatch ?

Les liens entre ces deux manufactures et leur marque respective ont toujours existé. Nous avons simplement poussé la réflexion un pas plus loin dans une logique de verticalisation et pour être en mesure d’attaquer les problèmes de front. Au niveau émotionnel, il s’agit également d’un signal fort.

Qu’en est-il de Jaquet Droz ?

Pour ce qui est de Jaquet Droz, la question se pose en d’autres termes. Si l’on prend Blancpain, par exemple, nous avons mis beaucoup de temps à atteindre la taille critique suffisante pour justifier un développement industriel propre à la marque. Il s’agit d’une question d’utilisation des capacités machine, car sinon on vogue dans des sphères de coûts de production qui ne sont plus raisonnables par rapport au produit. Breguet se trouve dans la même logique, où ce sont les mouvements, les calibres horlogers qui sont au centre de la démarche. Les capacités manufacturières d’ETA pour l’ensemble du groupe, de Lemania pour Breguet et de Frédéric Piguet pour Blancpain, font ainsi pleinement sens. En ce qui concerne Jaquet Droz, nous sommes beaucoup plus intéressés pour développer les métiers d’art au sein de la nouvelle unité de production plutôt que pour doter la Maison d’un parc machines. Cela n’entrerait pas dans son cœur d’activité. Je suis personnellement persuadé que Jacquet Droz dispose d’un très grand potentiel même si, pour l’instant, cela reste plutôt une marque de niche. Il s’agit donc d’affirmer sa différence, déjà perceptible à l’époque avec ses magnifiques automates, et de construire son avenir par étapes avec les bons distributeurs et les bons produits. Dans cet ordre d’idées, j’ai déjà réduit le nombre de points de vente de 200 à environ 170 dans le but de cibler davantage les marchés porteurs. Il ne sert à rien de s’éparpiller. Mieux vaut à ce stade concentrer ses forces.

Est-ce que Blancpain est en train de devenir une marque plus « sportive » vu les récents développements, avec la ligne L-Evolution notamment ?

En fait, nous cultivons davantage une partie de nos racines. Avant les années 1970, Blancpain était une marque plus sportive que classique, grâce entre autres à la Fifty Fathoms, un modèle lancé en 1953 qui a d’emblée rencontré un franc succès. Mais au début des années 1980, à une époque où la montre mécanique a traversé une des plus graves crises de son histoire, il n’était pas pensable de promouvoir une telle horlogerie autrement qu’avec des modèles classiques. Impossible de le faire avec la Fifty Fathoms, par exemple. Aujourd’hui, le marché a complètement changé et offre des opportunités de développement très intéressantes pour ce type de modèles, dont il faut absolument garder l’esprit tout en les dotant de technologies de pointe. Alors, si les gammes classiques vont rester très importantes pour Blancpain en termes de volumes et de complications horlogères, nous sommes également en train de pousser la Fifty Fathoms, une petite collection certes mais essentielle pour l’image de la marque. D’autant que la demande est là. De la même manière, avec notre gamme L-Evolution, nous sommes en train d’évoluer vers des modèles plus extrêmes. Finalement, c’était une bonne idée de la lancer en 2009 en limitant volontairement les volumes de production. Étant donné que l’année 2009 s’annonçait de toute façon comme un exercice difficile, nous ne pouvions pas être déçus. Il faut toutefois toujours garder à l’esprit que les marques du groupe doivent être complémentaires. Nous cultivons ainsi un esprit plus jeune pour Blancpain par rapport à Breguet.

Quel est donc le positionnement que vous recherchez avec Breguet ?

Les archives de cette maison sont proprement hallucinantes. Elles nous donnent ainsi des règles et des barrières à respecter. Ce qui ne veut pas dire que l’on doive impérativement s’accrocher à cette grandeur passée, bien au contraire. Abraham-Louis Breguet a été non seulement un génie de l’horlogerie, avec nombre d’innovations majeures à la clé, mais également un grand professionnel au niveau du marketing. À nous de conserver cet esprit en nous permettant des développements qui, de prime abord, pourraient passer pour incongrus, dans le silicium, par exemple, une percée importante autant pour la marque que pour l’industrie dans son ensemble. Mais il faut bien reconnaître que les choses sont plus faciles lorsque l’on dispose d’une telle tradition. Nous avons d’ailleurs bien l’intention d’exploiter les manuscrits Breguet que mon grand-père a rachetés avant son décès. Et nous ne nous contenterons certainement pas d’une simple réédition.

À propos de Breguet, qu’en est-il de la Marie-Antoinette originale qui a réapparu à Jérusalem. Avez-vous finalement pu la voir ?

Nous en sommes encore au stade des négociations. Donc non, nous n’avons pas encore pu la tenir entre les mains. Nous avons proposé nos services pour la remise en état de cette pièce exceptionnelle, mais encore faudrait-il qu’ils acceptent qu’elle sorte du pays. Cela n’a pas de sens d’envoyer nos spécialistes sur place pour un tel travail. Or, pour l’instant, ils ne semblent pas très intéressés. Question d’argent également.

Actuellement, l’ensemble les horlogers ne jurent que par la Chine. En faites-vous partie ?

Il est bien évident que l’on ne peut pas se permettre de rater la Chine. Blancpain y occupe d’ailleurs une bonne position alors que Breguet, arrivé plus tard, mérite que l’on intensifie les efforts de promotion. Cela dit, si la tentation est grande de tout miser sur la Chine, ce serait une erreur de le faire. Non seulement une présence mondiale de marques comme Blancpain et Breguet se justifie et s’impose, mais il est tout aussi essentiel de capter les flux touristiques en provenance de la Chine comme d’Inde ou du Brésil, qui forment une clientèle importante. De plus, le potentiel du Groupe Swatch reste très important aux États-Unis dans la mesure où il y est plus faiblement représenté que la concurrence. Le principal problème que l’on rencontre dans ce pays tient à la qualité de la distribution, où le manque de connaissances horlogères est patent, sans parler d’un taux de rotation du personnel extrêmement pénalisant. Cela dit, pour revenir à la question, il est évident que la Chine va représenter à l’avenir un marché consistant et de substance. Si la folie actuelle ne saurait durer, l’importance de ce marché est clairement destinée à croître.

Comment se présente Baselworld 2011 ?

En 2010, nous avons eu un important programme anticyclique. Le prochain Baselworld en sera le prolongement direct, sans toutefois jouer à fond la reprise. Si l’esprit est en effet de nouveau positif depuis le début de l’année, à cette époque, on pouvait difficilement le prévoir. Si bien que nous nous retrouvons aujourd’hui avec des problèmes de livraison. En d’autres termes, pour Blancpain, novembre a été un mois record et 2010 dans son ensemble sera une année record. Mais on aurait pu faire encore mieux. Nous avons en effet calibré nos capacités de production selon les commandes de nos partenaires, qui sont restés beaucoup trop frileux par rapport au potentiel de leurs marchés respectifs. Alors nous rencontrons aujourd’hui des difficultés à obtenir les volumes de boîtes ou d’aiguilles dont nous avons besoin. Cela dit, nous préparons de belles choses…

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