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Montres simples, problèmes complexes
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Montres simples, problèmes complexes

mercredi, 25 janvier 2017
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Christophe Roulet
Rédacteur en chef, HH Journal

“Vouloir est la clé du savoir.”

« Une trentaine d’années passées dans les travées du journalisme, voilà un puissant stimulant pour en découvrir toujours davantage. »

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6 min de lecture

Le segment d’entrée de gamme est devenu un thème récurrent auprès des Maisons de Haute Horlogerie. Si elles y consacrent désormais de réels efforts, l’équation se pose en des termes qui incluent une inconnue de taille : le client, de préférence jeune et peu porté sur le luxe.

L’effort est a patent, mais portera-t-il ses fruits ? Étant donné le recul marqué des exportations depuis un an et demi, les Maisons de Haute Horlogerie n’ont pu faire l’économie d’une réflexion quant à l’adéquation de leurs produits sur des marchés saturés de stocks, où les réseaux de distribution doivent aujourd’hui composer avec un commerce en ligne de plus en plus tentaculaire. Premier constat stigmatisé par Cyrille Vigneron, patron de Cartier : « Pour l’ensemble de la profession, le prix des montres a progressé trop vite. Aujourd’hui, il y a un rappel à la réalité, et les marques doivent faire un état des lieux et se demander quel est le juste prix de chacune de leurs collections. » Il est vrai que dans les années d’euphorie l’appétence pour des montres de plus en plus compliquées et donc de plus en plus chères explique en partie cette envolée. Il n’en demeure pas moins que les Maisons en ont largement profité pour élever le niveau général de leur tarification. Au point de couper les ponts avec une partie de leur clientèle en dépit des dégâts que l’on sait.

IWC Da Vinci Automatic 40
IWC Da Vinci Automatic 40
Cap sur l’acier

Dans les travées du Salon International de la Haute Horlogerie (SIHH), point n’était besoin de déambuler bien longtemps pour comprendre que le positionnement de produits est devenu un axe de réflexion prioritaire. Objectif : présenter des montres à rotation rapide, autrement dit dont le temps en boutique est compté. Et dans ce registre, le prix est évidemment l’une des composantes majeures. La quasi-totalité des Maisons aux volumes de production relativement conséquents se sont ainsi ingéniées à dévoiler des pièces d’entrée de gamme en misant sur les valeurs sûres de leurs collections déclinées en version acier et sans grande fioriture. Une TimeWaker Date Automatic chez Montblanc, une Panthère pour femme et un Drive Phases de Lune pour homme chez Cartier, une Reverso Classic chez Jaeger-LeCoultre ou encore une Classic Manufacture chez Ulysse Nardin et une Da Vinci Automatic 40 pour IWC. Sans oublier Baume & Mercier, probablement la seule Maison du SIHH vraiment rompue à ce type d’exercice qui présentait une fort réussie Clifton Club.

Les marques ont raconté trop de mensonges à leurs clients et ces derniers sont déçus. C’est une des grandes erreurs récentes de l’industrie.
François-Henry Bennahmias, CEO d'Audemars Piguet

Le cas d’Audemars Piguet n’est pas davantage à omettre en sachant que l’an dernier la manufacture a parfaitement su tirer son épingle du jeu avec un chiffre d’affaires qui a passé d’un peu plus de CHF 800 à presque CHF 900 millions, selon son CEO François-Henry Bennahmias, soit une croissance comprise entre 5 et 10 % pour une production de 40 000 pièces. Or, en termes de vraies nouveautés 2017, la moisson a été plutôt mince. À part la pièce joaillière Diamond Outrage pour l’effet tam-tam, la Maison s’est « contentée » d’animations sur ses incontournables Royal Oak et Royal Oak Offshore via de nouvelles couleurs ou de nouveaux matériaux. Autre décision d’importance, pas question pour Audemars Piguet d’augmenter les volumes de production qui pourraient même s’inscrire en légère diminution cette année. Une formule gagnante contre la crise ? « Quelle crise ? tonne François-Henry Bennahmias. Tout ce que je vois, c’est une crise sur la crédibilité des messages. Les marques ont raconté trop de mensonges à leurs clients et ces derniers sont déçus. C’est une des grandes erreurs récentes de l’industrie. »

Montre Drive de Cartier Phases de Lune
Montre Drive de Cartier Phases de Lune
L’attrait de la marque

Cyrille Vigneron ne dit pas autre chose en déclarant que « le luxe doit s’adapter à un nouvel environnement qui nous oblige à repenser la relation avec nos clients ou notre communication. » Et tout commence bien évidemment avec le produit. Avec une question lancinante : les montres simples, à trois aiguilles, voire avec une petite animation, sont-elles réellement la « tasse de thé » de ces champions de la complication ? Qui peut le plus peut le moins, pourra-t-on rétorquer. À cette différence près qu’en horlogerie les montres classiques représentent un exercice de style aussi complexe à réaliser que difficile à imposer vu la compétition féroce qui règne sur le marché. Avec cette difficulté supplémentaire pour les Maisons de Haute Horlogerie que leur entrée de gamme se situe à des niveaux où l’offre concurrente propose déjà des mécaniques relativement complexes et fiables dont l’amateur n’a pas à rougir. Reste donc à jouer sur l’attrait irrésistible que peuvent exercer les marques. Mais l’exercice se révèle de plus en plus périlleux, surtout si le discours commence à dérailler.

RJ-Romain Jerome Steam Punk Camo
RJ-Romain Jerome Steam Punk Camo

C’est là que tous les yeux se portent sur le client, dont la typologie se fait tous les jours plus évanescente, surtout s’il s’agit de prendre en compte la jeune génération. Car une chose est certaine, le luxe n’évoque pas les mêmes valeurs à ses yeux qu’à ceux de ses géniteurs, pas plus que l’environnement dont il s’entoure. Certaines marques l’ont compris, comme RJ-Romain Jerome, notamment avec sa Steam Punk Camo, pour prendre un exemple, voire Roger Dubuis avec une Excalibur Spider Pirelli Automatique Squelette, sans oublier quelques-unes des marques qui occupaient le Carré des Horlogers au SIHH, MB&F en tête avec sa nouvelle HM7 Aquapod ou encore H. Moser & Cie et sa ligne Swiss Alp.

H Moser Venturer Swiss Mad SIHH
H. Moser & Cie. Venturer Swiss Mad

Et il ne s’agit pas nécessairement de pièces que l’on pourrait qualifier d’entrée de gamme dans la segmentation horlogère. Un point commun entre ces marques : l’âge de leurs CEOs, qui forment la génération montante des patrons de la « nouvelle vague » horlogère, et les communautés de fans qu’ils ont su constituer autour de leurs produits à forte identité. La problématique est certes différente dans la mesure où l’on parle ici de volumes confidentiels si ce n’est d’éditions limitées en rapport avec la production des marques historiques. À modèle d’affaires différent, contraintes différentes, surtout si l’on songe que les grandes Maisons n’ont guère d’autres choix que d’entretenir une solide base industrielle. D’où l’urgente nécessité de trouver le bon message, les bons canaux et le bon produit, indispensable convergence dans la partie qui s’engage.

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