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Morgan Freeman, marin au long cours, Rolex au poignet
Histoires de montres

Morgan Freeman, marin au long cours, Rolex au poignet

vendredi, 27 novembre 2020
Par Frank Rousseau
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Frank Rousseau

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9 min de lecture

Il aura tout joué : les juges, Dieu, le Président des États-Unis, celui d’Afrique du Sud, les abolitionnistes, les prisonniers, les flics intègres, les chauffeurs, les géo-trouve-tout… Depuis plus de 50 ans, Morgan Freeman a incarné des personnages pleins de sagesse et de détermination. Pour nous, il revient sur les moments forts de sa carrière.

Vous souvenez-vous de votre toute première montre ?

Je suis né à Memphis, dans le Mississippi, en 1937, mais avec ma mère je suis parti vivre à Chicago. C’était l’époque de la grande migration des habitants du sud des États-Unis vers le nord, plus riche en emplois et en opportunités. J’ai donc vécu une courte mais intense partie de mon enfance dans cette grande ville balayée par des vents froids. La vie dans le ghetto était très dure et il n’y avait pas de boulot pour tout le monde. Le système D marchait à fond et seuls les plus malins s’en tiraient ! À cette époque, je n’avais pas le droit de sortir parce que ma mère trouvait que dehors c’était trop dangereux pour moi. Mon père nous avait déjà quittés depuis un petit bout de temps. On galérait vraiment avec ma mère. Elle n’avait pas de quoi payer la note de chauffage pendant l’hiver et le frigo était parfois vide. Quand je me réveillais le matin, il y avait du givre sur le miroir de la salle de bains. Avoir une montre, c’était donc superflu. Quand je voulais savoir l’heure, je le demandais aux passants ou alors je regardais les horloges des édifices publics. Un jour, ma grand-mère est venue nous rendre visite. C’était mon anniversaire. Elle s’est approchée de moi et m’a tendu un petit paquet emballé dans du papier kraft. Je me suis empressé de l’ouvrir. C’était une montre. Une montre toute simple. Mais à mes yeux, elle valait tout l’or du monde. À la fin des années 1950, alors que je n’arrivais pas à trouver de boulot, on m’a bien proposé quelques dollars pour ma montre, mais j’ai tenu bon ! Il était hors de question que je la vende.

Morgan Freeman
Morgan Freeman

Comme je voulais « voler », je me suis engagé dans l’US Air Force. Avec ma solde militaire, je me suis alors acheté une autre montre. Je voulais faire croire aux filles que j’étais un aviateur, alors du coup je m’étais acheté une montre qui pouvait faire croire que je passais ma vie dans les airs. Ce qui était faux, bien entendu. Je passais le plus clair de mon temps sur le plancher des vaches : j’étais mécano ! Quant à la montre, elle n’était pas fiable. Bref, j’ai ensuite été affecté en Californie du Sud. Comme Hollywood n’était pas loin, je suis venu cogner à cette porte qui brillait de mille feux. J’avais 21 ans quand j’ai commencé à considérer le métier d’acteur comme quelque chose de sérieux. Comme tant d’autres, je pensais que ce monde-là m’attendait les bras ouverts. J’avais tort. Ce n’est qu’à partir de 30 ans que le ciel a commencé à se dégager pour moi. Pendant neuf ans, j’ai vraiment souqué dur. Mais je connais des acteurs qui ont galéré bien plus longtemps que moi !

Morgan Freeman
Morgan Freeman

Aujourd’hui, je peux bien le dire : oui, j’ai eu faim ; oui, je me demandais parfois comment j’allais pouvoir vivre. Ces épreuves, je ne les ai pas traversées à Los Angeles mais à New York. Je n’avais rien dans les poches et j’allais d’audition en audition en espérant décrocher quelque chose. À ce moment-là, je n’avais aucune exigence, j’essayais juste de sortir la tête de l’eau. Un jour, je me suis rendu à un casting où je pensais avoir donné le meilleur de moi-même. J’étais vraiment content de ma prestation, pourtant sans résultat. En sortant de l’audition, il tombait des cordes. En traversant Broadway, j’ai vu un billet de 20 dollars flotter dans le caniveau. Pour moi c’était un signe, un signe d’espoir. La providence frappait à ma porte.

Et la chance a-t-elle tourné ?

Oui, à 30 ans, dès que j’ai commencé à faire de la télé. Vous savez, la télé, ça rapporte. La preuve, avec mon premier cachet, je me suis offert un grand voilier avec lequel j’ai fait la traversée de l’Atlantique en solitaire. Je me suis retrouvé dans des tempêtes terribles, vous savez. Ce qu’on appelle dans le jargon des « survival storms ». J’ai aussi croisé des icebergs. Mais ma plus grosse frayeur, c’était ce jour où j’étais dans l’eau en train de nager quand soudain j’entends un gros « bang ». Je pensais qu’un bateau venait de frapper la coque de mon voilier. En fait, c’était une énorme vague. La mer était en train de se déchaîner. Heureusement, j’ai pu remonter rapidement à bord. Comme j’avais besoin d’une montre qui résiste aux éléments marins, j’ai investi dans une Rolex Submariner avec un bracelet en croco pour me rappeler mon Mississippi natal mais aussi par pure coquetterie. Dans certaines conditions, vous ne pouvez pas vous permettre d’avoir des instruments qui ne fonctionnent pas. Votre vie en dépend. Dès que j’arrivais dans un port, les vieux loups de mer lorgnaient bien plus ma montre que mon bateau. Il est vrai que c’est plus facile à voler. On vous attend au coin d’une ruelle et hop… Mais bon, j’ai très vite compris qu’il ne fallait pas tenter le diable. J’évitais donc d’afficher ma belle montre…

Avez-vous déjà fantasmé sur une montre d’exception ?

Oui, quand j’étais ado. Pour me faire un peu d’argent de poche, quelques dollars tout au plus, je poussais le caddie de riches joueurs de golf. L’un d’entre eux retirait toujours sa montre avant de faire un swing. Je revois encore sa montre. Une grosse Rolex en or ! Elle était tellement lourde, on aurait dit un lingot au poignet. Du coup, il me la confiait le temps du parcours. Il ne voulait pas que sa tocante perturbe son centre de gravité et donc son swing. Je ne sais pas combien coûtait cette montre, mais je peux vous assurer que je ne la quittais pas des yeux. Si je l’avais perdue, j’aurais dû travailler des années pour la remplacer. (rires)

Morgan Freeman
Morgan Freeman
Faites-vous partie de ces acteurs qui font des tas de recherches avant d’investir un personnage ?

Non, aucune ! Quand j’ai joué Dieu dans Bruce tout-puissant aux côtés de Jim Carrey, des gens m’ont posé la même question. Je leur ai répondu que je me regardais chaque matin dans le miroir pour essayer de comprendre comment j’étais arrivé sur terre. C’est comme pour The Shawshank Redemption, on m’a souvent demandé si j’avais fait des recherches sur le milieu carcéral. Je sais que certains acteurs n’hésiteraient pas à passer deux ou trois nuits en prison pour savoir ce qu’on ressent. Moi, désolé, je préfère le confort de mon matelas à la maison. La seule fois de ma vie où j’ai fait quelques recherches, c’est lorsque j’ai incarné le grand Nelson Mandela. J’avais une admiration sans bornes pour cet homme. Or, à ses yeux, j’étais l’acteur idéal si un jour son autobiographie Long Walk to Freedom devait être portée à l’écran. Par vanité, je l’admets, je mourrais d’envie de l’entendre dire de sa bouche. Après tout, il s’agissait peut-être d’une rumeur ! Au cours d’une visite chez lui, à Johannesburg, avec ma femme, je lui ai glissé au cours de la conversation que pour l’incarner j’allais devoir lui tenir la main ! Et il a accepté. Pendant des années, je l’ai donc suivi au cours de ses déplacements. Je buvais littéralement ses paroles, car cet homme était un sage. Et je sais de quoi je parle : j’ai incarné Dieu par deux fois au cinéma !

Si vous n’aviez pas percé comme acteur, qu’auriez-vous fait ?

Aucune idée. Je n’avais pas de plan B !

Que faites-vous lorsque vous n’arrivez pas à dormir : vous comptez vos récompenses sur la cheminée ?

(éclat de rires) Non, j’allume la télé, comme tout le monde !

Pour regarder quoi ?

Du golf. Je suis un golfeur invétéré qui a la particularité d’être pathétique sur un green ! Je suis toujours en train d’essayer d’améliorer mon swing. C’est pour cela que je regarde Golf Channel, pour tenter de comprendre le mouvement parfait. Une fois que je pense avoir pigé, je peux aller me coucher. Mais de retour sur le green, je constate qu’en réalité j’ai encore des progrès à faire…

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