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Only Watch, une belle mécanique au service de la recherche
Economie

Only Watch, une belle mécanique au service de la recherche

vendredi, 10 novembre 2017
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Fabrice Eschmann
Journaliste indépendant

“Il faut se méfier des citations sur Internet !”

« Une grande histoire aux multiples auteurs : ainsi en est-il de la vie. Ainsi en va-t-il aussi de l’horlogerie. Sans rencontres, point d’histoire. »

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6 min de lecture

Il est très rare qu’un événement caritatif soit plus célèbre que l’organisation qui l’a créé. C’est le cas d’Only Watch, que beaucoup envient à l’Association monégasque contre les myopathies. Cette vente aux enchères a déjà permis de récolter près de 27 millions d’euros, de créer deux start-up et de déposer plusieurs brevets. Qui dit mieux ?

Il se définit comme un « chef d’orchestre ponctuel », ajoutant immédiatement : « Si je parviens à faire en sorte que la musique soit bien exécutée, je ne joue par contre moi-même d’aucun instrument. » S’il a créé et organise de main de maître la vente aux enchères Only Watch – un événement que beaucoup lui envient –, Luc Pettavino n’est en effet pas horloger. Sa grande force est d’avoir su sensibiliser des talents pour une même cause, tout en ne leur demandant pas l’impossible : « Ils font ce qu’ils savent faire, sans se la raconter. » Dans le domaine de l’horlogerie bien sûr, mais aussi dans celui de la recherche médicale. Avant d’être pourvoyeuse de fonds grâce à Only Watch, l’Association monégasque contre les myopathies (AMM) est en effet une force fédératrice, réunissant des chercheurs d’horizons différents autour d’une même table. Et n’hésitant pas, lorsque c’est nécessaire, à créer des start-up pour protéger les acquis et faciliter les progrès.

Faire partie de la solution

Lancée pour la première fois en 2005 sur un rythme bisannuel, Only Watch n’a jamais cessé de grandir : d’une petite trentaine de lots adjugés pour 1,9 million d’euros à ses débuts, la vente caritative a réuni, en 2015, 44 pièces dispersées pour 10,3 millions. Cette année encore, avant même le premier coup de marteau, l’événement bat d’ores et déjà un nouveau record avec 50 objets horlogers généreusement offerts à l’AMM pour sa récolte de fonds. Car les passionnés et les collectionneurs ont tendance à l’oublier : si Only Watch est certes une incroyable compétition horlogère comme il n’en existe aucune autre, capable de fédérer des marques habituées à plus de rudesse commerciale, elle est avant tout un moyen de récolter de l’argent pour lutter contre les myopathies, notamment la dystrophie musculaire de Duchenne (DMD). En 10 ans, l’AMM est ainsi parvenue à lever près de 27 millions d’euros pour la recherche.

Je me suis demandé comment faire partie de la solution ?
Luc Pettavino

À l’origine de ce succès, la volonté d’un homme de ne pas assister passivement à la maladie de son fils. Organisateur du Monaco Yacht Show pendant deux décennies, Luc Pettavino décide, lorsque son enfant est diagnostiqué, en 2000, de revoir ses priorités. « Je me suis demandé comment faire partie de la solution », explique-t-il simplement aujourd’hui. Il fonde alors l’AMM, puis amorce des collectes de fonds, déjà sur le modèle de la vente aux enchères. En utilisant le salon nautique comme levier, il propose aux visiteurs fortunés des œuvres d’art, des produits de luxe, des grands vins. L’idée de la montre ne viendra qu’en 2004 : « Blancpain était sponsor du Monaco Yacht Show, raconte-il. Je me suis alors rendu compte que la montre, un objet très compact, disposait d’un marché très porteur, avec ses collectionneurs, ses experts et ses pièces rares. Je suis donc allé voir Nicolas Hayek, qui m’a soutenu dès le départ. »

L’efficacité comme moteur

Ce pragmatisme, Luc Pettavino en a fait son moteur : face à la nature du mal, l’efficacité est reine. Ainsi, lorsqu’il commence à prendre contact avec le monde de la recherche, qu’il ne connaît pas, il découvre des besoins assez différents de ceux qu’il imaginait : « Avant de parler de ressources financières, les scientifiques avaient besoin d’espaces de discussion au sein desquels ils pourraient discuter librement, entre eux, des avancées de la recherche préclinique et des solutions à mettre en œuvre. C’est comme cela que sont nés Les Tables rondes monégasques et le programme ICE, International Collaborative Effort for DMD. »

Cette stratégie a permis de créer et consolider les relations entre les différents centres de recherche internationaux ayant une expertise dans le domaine de la dystrophie musculaire de Duchenne. Aujourd’hui, les efforts – et les espoirs – de l’AMM portent sur la thérapie génique : « La DMD, qui touche environ 1 garçon sur 3 500, est une forme très sévère de maladie neuromusculaire dégénérescente, relève Luis Garcia, directeur de recherche CNRS à l’université de Versailles. Elle est due à une mutation de l’ADN, qui raréfie une protéine essentielle aux muscles, la dystrophine. Les scientifiques explorent plusieurs pistes, mais avec le soutien de l’AMM nous travaillons sur ce qu’on appelle une “molécule antisens”, sorte d’ADN artificiel capable de réparer l’ARN. »

Bientôt sur l’homme

Développé par le professeur Christian Leumann, de l’université de Berne, ce nouveau traitement se révèle très prometteur. Mais pour passer en phase d’essais cliniques, les chercheurs ont besoin du produit en suffisance. En 2012, l’AMM fonde alors la start-up Synthena, seule entité capable de produire une molécule non encore commercialisée. Dans le même élan, l’association crée SQY Therapeutics, spin-off de l’université de Versailles chargée, elle, des aspects sécuritaires liés aux essais. Aujourd’hui, grâce à Only Watch, l’AMM emploie une quinzaine de collaborateurs scientifiques avec à la clé le dépôt de plusieurs brevets. « Notre approche n’est pas de faire de l’argent, mais d’amener les essais cliniques le plus loin possible, précise Luc Pettavino. Je ne veux pas que les grands de la pharma achètent ces brevets pour les mettre dans un tiroir. Je souhaite au contraire que ceux qui sont concernés gardent la main sur la recherche. » Au vu des résultats encourageants, les tests sur l’homme vont bientôt pouvoir commencer. « Le calendrier est à deux ans, estime Luis Garcia. Mais l’objectif est à tout prix de lancer un médicament qui marche, pas de commercialiser quelque chose d’inefficace. » Qui dit mieux ?

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