Pour Panerai, toute la difficulté est de se renouveler sans rien changer. Question de ne pas se mettre les Paneristi à dos. Alors comme le monsieur Jourdain de Molière qui faisait de la prose sans le savoir, la Maison d’origine florentine verse dans la nouveauté sans en avoir l’air. Ne dit-elle pas dans l’introduction d’un de ses modèles 2017 présenter « une innovation invisible mais révolutionnaire », à savoir une nouvelle création issue de ses travaux de recherche sur les matériaux. Il s’agit en l’occurrence d’un verre métallique (Bulk Metallic Glass) utilisé pour le boîtier de la nouvelle Luminor Submersible 1950 BMG-TECH™ 3 Days Automatic – 47mm, dont le secret « ne réside pas tant dans son aspect – similaire à celui du titane mais d’un gris plus prononcé – que dans sa structure atomique ». Plus léger et deux fois plus résistant que l’acier, cet alliage fait de zirconium, cuivre, aluminium, titane et nickel offre ainsi des propriétés qui le rendent extrêmement résistant aux chocs comme aux rayures et totalement insensible à la corrosion comme aux champs magnétiques.
La Nasa séduite
Pour Omega, ce verre métallique n’est pas un total inconnu pour en avoir déjà expérimenté l’une des variantes sous la forme de Liquidmetal®, utilisé pour la graduation de certaines lunettes de ses montres de plongée. Tout autre échelle chez Panerai : le BMG-TECH™ obtenu par injection rapide à haute pression et à haute température pour éviter sa cristallisation est mis à profit pour le boîtier, la lunette, la couronne et le protège-couronne. Au sein de la marque, on n’hésite d’ailleurs pas à parler de matériau d’avenir, susceptible de remplacer le silicium pour certains composants du mouvement. La Nasa ne vient-elle pas de l’adopter pour ses propriétés hors du commun ? Chez Panerai, la résistance, la robustesse et la légèreté accrue du matériau ont déjà été mises à profit dans ce modèle de plongée professionnel doté du calibre P.9010 à remontage automatique étanche à 300 mètres. Et ce n’est qu’un début.
Panerai n’hésite pas à parler du verre métallique comme un matériau du futur, susceptible de remplacer le silicium pour certains composants du mouvement.
Panerai n’allait toutefois pas s’arrêter en si bon chemin. Pour ne pas démentir son appellation de Laboratoire d’idées, la Maison dévoilait « une brillante optimisation des possibilités infinies du carbone » sous la forme d’une Panerai LAB-ID™ Luminor Carbotech™ 3 Days – 49mm. Particularité de ce modèle qui sera produit à 50 exemplaires : une absence totale de lubrification permettant d’offrir une garantie de 50 ans sur le mouvement. Au-delà de l’effet d’annonce, force est de constater qu’une nouvelle fois chez Panerai la force est à l’intérieur. Pas question en effet de toucher au design de cette Luminor qui respecte en tous points les codes établis de la collection. Première différence toutefois : la noirceur du cadran. Doté de la structure classique en sandwich développée par la marque, il présente un revêtement en nanotubes de carbone – une première en horlogerie –, qui a la particularité d’absorber la lumière au maximum. Il en résulte un ton noir profond du cadran qui contraste de manière spectaculaire avec les index et les aiguilles. À l’heure actuelle, seule la Sequential One S110 Evo Vantablack de MCT peut soutenir favorablement la comparaison en termes de noir absolu. Mais la solution retenue par MCT pour le cadran de fond de son modèle, à savoir le Vantablack, lui aussi composé de nanotubes de carbone d’une épaisseur d’un millionième de millimètre, donnant le « matériau le plus noir jamais fabriqué par l’homme », n’a pas été retenue par Panerai pour des questions de résistance aux chocs.
Du carbone et encore du carbone
Côté boîtier, c’est le carbotech qui a été retenu, un matériau composite à base de fibre de carbone dont l’utilisation en horlogerie est due à Panerai. « En plus d’offrir des performances techniques exceptionnelles, explique la Maison, le carbotech se distingue par son aspect noir, mat et hétérogène, qui varie selon la manière dont le matériau a été découpé, de sorte que chaque exemplaire est absolument unique. » Côté innovation, il faut aller chez Richard Mille et sa RM 50-03 de 40 grammes, bracelet compris, pour trouver un matériau qui, là également, soutient la comparaison. Pour obtenir une telle légèreté qui fait de ce chronographe le plus léger jamais réalisé, les équipes d’ingénieurs de Richard Mille ont travaillé avec l’université de Manchester et le centre de recherche de McLaren pour produire un nouvel alliage fait de carbone TPT dans lequel a été injecté du graphène, un nanomatériau révolutionnaire 6 fois plus léger que l’acier mais 200 fois plus résistant.
Restait à Panerai à aborder la question du mouvement. Grâce à un ensemble de solutions encore une fois basées sur les propriétés mécaniques des composés de carbone, la platine, les ponts, les barillets, l’échappement et le dispositif antichoc ne nécessitent aucune lubrification. Cette structure de calibre lui permet ainsi de proposer sans sourciller une garantie de 50 ans sur le mouvement. Qui a dit que l’horlogerie était une activité générationnelle ? Parmi les Maisons exposantes du Salon International de la Haute Horlogerie 2017, Roger Dubuis, tout comme Panerai, a répondu aux sirènes du carbone avec son Excalibur Spider Carbon. Dans une boîte en titane et carbone se loge ainsi un calibre high-tech dont la platine, les ponts et la partie supérieure de la cage du tourbillon volant sont entièrement réalisés en carbone. « Ainsi, précise Roger Duis, la platine principale et la boîte forment un châssis rendu plus léger par la composition même de ses matériaux. » Résultat : le mouvement de cette Excalibur pèse à peine 7,5 grammes, un peu moins de 40 grammes pour la tête de montre. Un galbe qui a permis un gain énergétique important, synonyme d’une réserve de marche en augmentation de 50 % à 70 heures. Les horlogers sont clairement passés du côté carbonique de la force !