Question intrigante entre toutes, que peut-il bien se passer au Salon International de la Haute Horlogerie, une fois la nuit tombée ? Peut-être que, comme au théâtre, les lumières claquent et s’éteignent. Et qu’alors certaines vitrines irradient une lumière étrange. Serait-ce une forme de vie extraterrestre débarquée en plein Salon ? De la laine de mouton croisé avec une méduse ? Eh non, il s’agit de Swiss Super-LumiNova, SLN de son petit nom. Cette année, ses pigments phosphorescents ont largement fait de l’œil au Salon genevois : en version sportive chez Panerai, cosmique chez Girard-Perregaux, féline chez Cartier, ombres chinoises chez Élégante by F.P.Journe ou encore fluidique avec HYT. L’horloge de table Medusa par MB&F et L’Epée parvient même à réunir l’animal et l’horlogerie.
Produite en Suisse, la SLN offre depuis 1994 une alternative bienvenue à l’utilisation de matières radioactives. Pour une visibilité de nuit ou sous l’eau, elle illumine le plus souvent les index et les aiguilles. Mais depuis quelques années, les avancées techniques dans ses applications titillent la créativité des horlogers. Luminova, qui la produit, ainsi que les entreprises spécialisées dans son application ou sa transformation, ne chôment pas. Avec une puissance doublée depuis sa création, la SLN se trouve désormais dans une large palette de couleurs de jour (plus de 3’000 !), de nuit, ainsi que sous forme de composites et céramiques.
SLN extra-résistante
Avec le modèle Bridges Cosmos, Girard-Perregaux brille en termes d’innovation luminescente. Son calibre inédit comporte deux globes de titane. Sur le premier apparaît une carte du ciel, et une mappemonde sur le second. Toutes deux irradient de bleu dans la nuit grâce de l’hydro-céramique luminescente. Très résistante et inrayable, cette matière dernier cri permet une « texturisation » au laser. Girard-Perregaux a ainsi pu recréer une géographie terrestre fidèle, un impératif pour la Bridges Cosmos.
Élégante by F.P.Journe quant à elle tire parti d’un saphir luminescent pour inverser le combo habituel. Ainsi, des aiguilles non phosphorescentes se découpent sur un cadran de saphir lumineux. Pour ce faire, la matière liquide est moulée puis durcie au four avant l’assemblage sur le cadran, d’une grande précision. Cette année, la marque présente une nouvelle version titane traité « Tytalit », pour renforcer sa dureté.
Les lumières de la mer
Positionnée dans le registre de la performance sportive, la Submersible Marina Militare Carbotech de Panerai opte pour une luminescence maximale. Au menu du cadran, des index moulés dont la composition n’est pas divulguée mais qui devraient être de type LumiCast ou Billight, des résines phosphorescentes. Dans ce cas, la concentration de pigments, moins dilués que lors de l’application par poudre et liants, offre une puissance lumineuse particulièrement élevée. Pour la teinte de nuit, Panerai choisit le bleu, la plus performante également, accompagnée de vert, qui rappelle les matières luminescentes radioactives d’autrefois. À noter, une teinte verte, bleue ou grise de jour selon le modèle. De même, un composite luminescent se retrouve chez MB&F et l’Epée, sur le trèfle figurant le dessous de la méduse de l’horloge de table Medusa.
Poudre brillante
D’autres marques utilisent de façon plus traditionnelle la SLN, par couches de pigments, mais dans une optique créative. Sur la Montre Ronde Louis Cartier Regard de Panthère, les yeux du félin diffusent un halo phosphorescent. L’artisan a déposé dans chaque case du cadran quadrillé de la peinture, mêlée de pigments de SLN autour du regard. Autre création luminescente, les ponts blancs de jour de la Montre Santos de Cartier Squelette Noctambule se révèlent entièrement brillants de nuit.
Enfin, HYT présente H2.0 « Time Is Fluid ». Sur ses flancs de saphir apparaissent des lettres remplies de matière luminescente. Une réalisation très architecturale pour la marque, familière des jeux de lumière. Ses modèles avec fluide vert s’illuminent en effet de nuit, grâce à de la SLN placée sous les capillaires. HYT utilise aussi un module lumière mécanique exclusif dans la H4 Alinghi et la H4 Metropolis (lire “Quand la fée électricité illumine les montres”).
Ainsi, les horlogers continuent à investiguer le large éventail de possibilités en matière de luminescence. Pour le plus grand bonheur des heureux propriétaires d’une montre capable de changer de visage selon la luminosité.