Existe-t-il un « style » François-Henry Bennahmias, patron d’Audemars Piguet depuis un peu plus d’un an ? Explications de l’intéressé rencontré lors du Salon international de la Haute Horlogerie (SIHH) 2014 clos à fin janvier : « C’est simple, tout ce que nous faisons bien, nous allons continuer à le faire, le reste passe à la trappe pour se concentrer sur autre chose. Il y a toujours des rebuts, quelles que soient les activités. Il s’agit donc de faire le tri. Telle est mon approche, très terre à terre. » Une approche qui a semblé avoir fait mouche en 2013 avec un chiffre d’affaires qui a franchi la barre des CHF 700 millions, sans toutefois que l’on sache avec précision où se situait celui de l’année précédente pour être chiffré à « quelque » 600 millions. La progression n’en reste pas moins notable avec une production qui a passé de 31 000 à 35 000 montres.
Des collections « sages »
« Il est vrai que nous ne nous attendions pas à une telle évolution, poursuit François-Henry Bennahmias. Ce qui a donc été une bonne surprise. Pour 2014, nous avons effectué un “petit” travail en cultivant la qualité mais avec une volonté de sagesse. Nos collections s’inscrivent dans cet esprit. Rien d’exceptionnel donc, je tiens à le dire, car je déteste les superlatifs gratuits, mais des collections bien construites qui tiennent la route. À la fin de ce SIHH, je peux dire que les détaillants l’ont très bien compris. Ils ont parfaitement accepté notre démarche et nos gammes qui vont leur permettre de gagner de l’argent. »
De fait, l’année 2014 d’Audemars Piguet se décline en six versions d’un Chronographe Royal Oak Offshore 42 mm et une Royal Oak Offshore Diver 42 mm. Retour des montres « concept » également mais avec une nouvelle interprétation de la Tourbillon Royal Oak Concept GMT déjà présentée en 2011. Du côté des gammes féminines, on reste aussi dans l’univers des Royal Oak : automatique 41 mm, chronographe automatique 41 mm et Offshore 37 mm quartz, soit trois pièces serties. Sans oublier une montre Haute Joaillerie asymétrique qui suscite le plus grand respect. Au total, beaucoup d’attention dédiée à l’habillage et aux matériaux, notamment la céramique et le titane, pour alimenter le « mythe » de la Royal Oak Offshore née en 1993.
Tous ensemble pour le « AP Move »
Cette approche plutôt conservatrice laisse à penser que les priorités d’Audemars Piguet ont récemment inclus d’autres processus visant à mettre en place une organisation pouvant compter, au niveau industriel, sur un réseau fiable de fournisseurs ; une organisation soudée, qui se distingue par son sérieux et son professionnalisme. François-Henry Bennahmias s’y est certainement employé avec une énergie caractéristique de celle d’un directeur sportif, étant donné son inclination à appliquer au monde de l’industrie des méthodes propres à celles qui régissent les athlètes de haut niveau. « Lorsque j’étais en charge du marché américain pour Audemars Piguet, mon activité consistait, entre autres, à faire du management, de la gestion des ressources humaines. Or, pour moi, cela passe par un franc-parler, tout en évitant la perte de temps en séances inutiles. Un esprit paysan, pourrait-on dire. Mais l’important, par-dessus tout, est de rassembler. Ce que je fais aujourd’hui au niveau du Groupe. On ne peut évidemment pas comparer une équipe de 70 personnes, comme c’était le cas aux États-Unis, avec une entreprise qui compte 1 200 collaborateurs en Suisse et à l’étranger, et qui continue d’embaucher. Mais l’idée reste la même. Résultat : les détaillants sentent aujourd’hui très bien cette conjonction de compétences au sein d’une marque qui parle d’une même voix et offre un front uni. »
Pour mieux illustrer son propos, François-Henry Bennahmias, 20 ans de Maison Audemars Piguet, n’hésite pas à mimer l’« AP Move », une sorte d’incantation gestuelle qui pourrait s’apparenter à la fameuse danse du Haka des All Blacks, les rugbymen néo-zélandais, la hargne en moins. À chaque occasion déterminante, les collaborateurs en font la démonstration. Désormais, la Royal Oak, c’est donc aussi cette « authentic attitude » qui voit le ballet mécanique des garde-temps maison appuyé par une chorégraphie mettant en scène des valeurs plus profondes. Foi de François-Henry Bennahmias.