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Histoire & Pièces d'exception

Brittany Cox, restauratrice horlogère d’exception – Partie 1

mercredi, 22 janvier 2020
Par Cait Bazemore
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Cait Bazemore

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8 min de lecture

Brittany Nicole Cox est l’une restauratrices les plus reconnues au monde. De ses études à ses « exploits » actuels, elle raconte sa vision du monde horloger.

Même si vous considérez être un collectionneur de montres chevronné, voire un aficionado averti, il est fort possible que l’univers de la restauration horlogère ne vous soit pas familier. Et donc que vous ne connaissiez pas Brittany Nicole Cox, l’une des professionnelles les plus reconnues au monde dans ce domaine. Qu’à cela ne tienne ! Dès son plus jeune âge, Brittany Nicole Cox a toujours été fascinée par des questions hautement philosophiques qui ont conduit à la création d’objets mécaniques. C’est avec une formation de pointe, une vaste connaissance technique et un peu de magie qu’elle nous emmène dans le monde de la restauration horlogère. Un monde à part où son travail ne se limite de loin pas à un simple savoir-faire. Il met en effet en lumière la signification profonde de ces objets horlogers qui renvoient à nos traditions culturelles, voire au-delà, aux fondements mêmes de la connaissance.

Comment êtes-vous arrivée dans le monde de la conservation horlogère ?

Lorsque j’étais à l’université, je suivais un programme en philosophie qui traitait de métaphysique et d’épistémologie. Un grand nombre des questions que soulève la métaphysique m’ont permis de voir que l’étude de ces questions pouvait avoir une approche concrète et tangible à travers la création d’automates, soit des mécanismes qui simulent le monde naturel. Ces créations sont devenues de plus en plus complexes au fur et à mesure des avancées technologiques et de nos capacités à créer des mécanismes intelligents.

Brittany Nicole Cox
Brittany Nicole Cox

Grâce à l’étude de ces artefacts, j’en ai appris plus sur l’origine et l’évolution du « Silver Swan », un automate créé par John Joseph Merlin et James Cox aux alentours de 1700. La découverte de cet objet a renforcé ma fascination et mon intérêt pour cette approche concrète et tangible de la métaphysique. À la fin de mes études en philosophie, j’ai donc tout de suite commencé une formation en horlogerie – un programme CW21 au sein du Watch Technology Institute à Seattle. Je me suis ainsi familiarisée avec la micromécanique et l’usinage mais sans y trouver véritablement mon compte. Mon but n’a jamais été de devenir horlogère. En sortant de l’institut, je me suis donc inscrite au West Dean College, une incroyable école de restauration en Angleterre créée par Edward James pour soutenir les artisans durant la Seconde Guerre mondiale. C’est là que j’ai étudié l’horlogerie du XVIIIe siècle avec Matthew Read, qui était alors le conservateur assigné à la restauration du Silver Swan. Pour moi, c’était un privilège incroyable. J’ai fini par obtenir ma maîtrise en études muséales avec une spécialisation dans la conservation horlogère, à savoir la conservation et la restauration d’objets dynamiques et d’horloges compliquées.

Ce type de travail vous a-t-il toujours passionnée ?

Enfant, j’étais déjà intéressée par la mécanique et les objets qui obéissent à un certain nombre de règles pour être opérationnels. Je collectionnais les boîtes à musique, les montres, des petites choses comme les aimants, les ressors, et les rouages… N’importe quoi, en fait, qui répondait à des principes me permettant d’en déduire le fonctionnement. En grandissant, j’ai réalisé que j’avais les capacités de faire quelque chose d’étrange, quelque chose que je ne croyais même pas possible. Je suis ensuite allée à l’université du Texas, un endroit où l’on ne rencontre pas beaucoup d’horlogers. Je me souviens d’être allée dans une boutique de réparation de montres où j’ai demandé s’il y avait moyen d’obtenir un stage ou d’aider d’une quelconque manière. Ils m’ont dit qu’il y avait des écoles pour ça et qu’on ne pouvait pas simplement apprendre sur le tas. Ils ont d’ailleurs été très clairs. Si je voulais être une horlogère compétente, il fallait que j’y consacre ma vie. C’est alors que j’ai déniché ce programme à Seattle en réalisant que je n’avais pas vraiment le choix. Je devais impérativement passer par là. J’ai donc pris la décision d’embarquer tout ce que je pouvais dans ma voiture et d’entamer ce voyage.

Pourquoi avez-vous décidé de créer votre propre atelier, Memoria Technica, plutôt que de travailler dans un musée ?

Mes intentions ont toujours été de travailler dans un musée, mais durant ma maîtrise une modification de la loi en Angleterre m’interdisait d’obtenir un visa de deux ans au terme de mes études. Une modification qui ne tenait pas compte des droits acquis. J’ai bien tenté de décrocher un job, mais en tant qu’Américaine, avec un visa temporaire, je n’ai évidemment pas pu décrocher d’emploi. Je suis donc revenue aux États-Unis. Mais comme j’étais l’une des premières diplômées dans la conservation horlogère, personne ne savait ce dont j’étais capable. J’ai envoyé des lettres de candidature à toutes les institutions du pays qui possèdent des collections horlogères avec pour seules réponses le manque de budget pour m’engager. Il ne me restait plus qu’à lancer ma propre entreprise. C’était vraiment démoralisant, car j’avais travaillé dur pour terminer première de ma promotion. Et j’étais pleine d’espoir, certaine d’un futur doré. Vu le manque d’opportunités, j’ai rapidement déchanté. J’ai donc dû me construire toute seule, ce qui n’a pas été chose facile.

Lorsque je me suis installée, je n’avais aucune ressource. Je n’avais pas encore d’expérience professionnelle et mes économies étaient au plus bas. De plus, j’avais besoin d’un équipement spécifique pour pouvoir exercer mon travail, un type d’équipement plutôt rare, voire précieux et de collection dans certains cas. Autant dire un défi de taille. Heureusement, mon séjour au Royaume-Uni m’avait valu une bonne réputation. Si bien que l’entourage d’un prestigieux horloger récemment décédé est entré en contact avec moi pour me demander si j’étais intéressée pour reprendre son atelier et son équipement. Comme j’étais toujours sans ressources, je leur ai expliqué la situation en précisant que j’adorerais pouvoir visiter l’espace, en l’occurrence un atelier hallucinant de 1’500 m² dans lequel ce restaurateur de talent avait entassé en 30 ans un équipement extraordinaire. Il s’agissait d’un véritable sanctuaire, patiemment construit par un amoureux de l’horlogerie. J’ai tout de suite compris que ma place était là et que je devais trouver un moyen pour obtenir cet atelier. C’est ce que j’ai fait. J’en ai repris l’exploitation et j’ai travaillé dur, à raison de 16 heures par jour, pour en payer l’équipement.

Votre domaine ne compte pas beaucoup de professionnels. Qui a été votre mentor ?

J’ai eu la chance d’avoir le soutien de plusieurs mentors durant tout mon parcours. Je me sens particulièrement chanceuse d’avoir été aussi bien entourée. Dans un environnement plus large, on remarque que d’autres personnes sont aujourd’hui désireuses de raviver cet artisanat en voie de disparition. C’est toujours encourageant de savoir que l’on n’est pas seul. J’ai également quelques collègues qui viennent occasionnellement me donner un coup de main. Ensuite, il y a les figures historiques. J’ai décoré un mur entier de mon atelier avec ces horlogers que j’admire, comme Harrison, Breguet ou encore Robert-Houdin, qui m’inspire le plus grand respect en tant qu’horloger et père de la magie moderne. Il y a également Jacob Frisard, technicien à l’époque chez Jaquet Droz pour la réalisation d’oiseaux chanteurs. Un mécanicien de génie à qui l’on doit de fantastiques innovations dans ce domaine.

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